Un rare double homicide adapté en pièce de théâtre

Du 10 au 20 janvier au Next Stage Festival

Lucky
Les acteurs Christian Jadah et Katharine King joueront la pièce de Marie Leofeli R. Barlizo au Next Stage Festival du 10 au 20 janvier prochains.
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Publié 09/01/2019 par Claire Gillet

À Markham en 2010, une jeune Canadienne d’origine vietnamienne, Jennifer Pan, engage des tueurs à gages pour assassiner ses deux parents.

Ces derniers venaient de découvrir que la jeune femme avait falsifié ses bulletins de notes et ses diplômes des années durant.

Présentée au Next Stage Festival du 10 au 20 janvier prochains, la pièce anglophone Lucky, écrite par Marie Leofeli R. Barlizo, s’inspire de cette histoire macabre. Le but de la dramaturge est simple: faire comprendre au public le geste de Jennifer Pan.

Filles d’immigrés asiatiques

Cet objectif peut sembler déplacé ou farfelu. Cependant, le parcours personnel de Marie Leofeli R. Barlizo fait écho à celui de Jennifer Pan, et justifie ainsi son empathie envers la jeune fille.

Marie Leofeli R. Barlizo
La dramaturge Marie Leofeli R. Barlizo (Photo: Sabrina Reeves).

Elle aussi est une fille d’immigrés asiatiques. Ses parents, originaires des Philippines, arrivent à Montréal lorsqu’elle n’a que 5 ans.

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Alors que tout la destine à une carrière dans la médecine, elle choisit de devenir auteure. «Ça a été la plus grosse décision que j’ai eue à faire dans ma vie. Mes parents ne m’ont pas beaucoup supportée», explique-t-elle.

En 2002, elle devient la première dramaturge issue de la diversité culturelle à être diplômée de l’École nationale de théâtre. Aujourd’hui, elle donne des cours au sein de l’école et travaille dans le Black Theatre Workshop.

Une pression constante

«Lorsque j’ai pris connaissance de cette histoire via l’article «Jennifer Pan’s revenge», ça m’a brisé le cœur. Je crois que tous les Asiatiques peuvent comprendre», nous explique Marie Leofeli R. Barlizo.

«Il y a une grosse pression sur les épaules des jeunes dont les parents ont émigré d’Asie. Ces derniers vivent un véritable choc des cultures lorsqu’ils arrivent en Amérique du Nord. En conséquence, ils veulent que leurs enfants donnent tout pour réussir, ils attendent beaucoup d’eux. Dans le cas de Jennifer Pan, elle a dû faire du piano et du patinage artistique à haut niveau très jeune, et elle ne sortait pas.»

Non seulement la pression est exercée par les parents, mais elle est aussi véhiculée par la société. «Les gens assimilent les Asiatiques à une minorité modèle, sérieuse et travailleuse. C’est une pression sociale supplémentaire pour les jeunes.»

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«Dans de nombreux pays asiatiques, la famille est un pilier important. On ne veut pas blesser ses proches, ce qui inclut donc de leur mentir parfois. Moi-même ça m’est arrivé. Je peux donc comprendre comment elle s’est sentie piégée, même si je ne peux pas expliquer qu’elle en soit arrivée à un meurtre».

Lucky
Les acteurs Christian Jadah et Katharine King de la pièce Lucky de Marie Leofeli R. Barlizo.

Lucky

Écrire cette pièce de théâtre s’est imposé très vite pour Marie Leofeli R. Barlizo. Toutefois, la dramaturge a tenu à s’éloigner quelque peu de l’histoire originale. «Je ne voulais pas faire un documentaire sur cette affaire.»

Le personnage principal est donc Nina, une jeune fille dont les parents ont émigré des Philippines. Alors qu’elle projette de quitter son université, elle rencontre un conducteur de métro, ancien skinhead, qui devient son ami. Ce dernier n’est pas stable psychologiquement, il souffre de stress post-traumatique depuis qu’il a renversé une fille dans une gare.

Ensemble, ils façonnent un plan pour aider Nina à se sortir de sa situation familiale. Mais celle-ci n’est pas vraiment celle qu’elle se prétend être. Prenez vos places pour savoir la suite!

Le titre de la pièce, Lucky, peut être compris selon des perspectives personnelles. «On pense toujours que les autres sont plus heureux que nous-mêmes, et cela alimente la discrimination. Je crois que l’on ne croit pas assez en nous-mêmes.»

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Où sont les Canadiens-Asiatiques?

«Je souhaiterais profondément que davantage d’histoires sur les Canadiens-Asiatiques soient racontées, à travers le théâtre, le cinéma, la télévision. C’est l’une des cultures dont on parle le moins», regrette Marie Leofeli R. Barlizo.

«Les histoires ont le pouvoir de nous transformer, de nous faire réfléchir sur nous-mêmes. S’il y en avait plus sur cette minorité, cela permettrait aux jeunes de changer la perception qu’ils ont d’eux-mêmes.»

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