Un «Plan d’action» de bon augure

Dans l’attente de détails sur sa mise en œuvre

Plan d'action langues officielles
Mélanie Joly et Justin Trudeau ont reçu des dirigeants des minorités de langues officielles, dont le président de la FCFA Jean Johnson en mars 2018.
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Publié 03/04/2018 par Lucas Pilleri

Le Plan d’action pour les langues officielles des cinq prochaines années a été finalement dévoilé le 28 mars à Ottawa. La majorité des organismes communautaires francophones ont applaudi l’ensemble de mesures totalisant 2,7 milliards $ et ont loué son approche du «par et pour». Mais certains observateurs restent prudents, dans l’attente de détails sur sa mise en œuvre.

«Le gouvernement a bien écouté les demandes de la communauté», estime Martin Théberge, président de la Fédération culturelle canadienne-française. Le responsable souhaiterait même aller plus loin, réclamant une «réelle collaboration» avec le gouvernement. «C’est en travaillant ensemble qu’on obtiendra le meilleur impact de ces investissements», précise-t-il.

francophonie
Martin Théberge

Le bon ton

Jean Johnson était à Ottawa lors de l’annonce et s’est même entretenu en comité restreint avec le premier ministre Justin Trudeau et la ministre du Patrimoine canadien Mélanie Joly avant le dévoilement.

«J’ai adoré le ton des discours», commente le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne, lui aussi enchanté par l’approche. «Il y a un désir de changer la culture au sein de l’appareil gouvernemental. Le ‘par et pour’ reflète le besoin des communautés de se prendre en main.»

Source de fierté

Pour Linda Cardinal, professeure de sciences politiques à l’Université d’Ottawa, le gouvernement a démontré qu’il prenait toute la mesure de ses obligations. Elle se réjouit de ce que les langues officielles soient enfin reconnues «comme une source de fierté, de richesse et d’identité, plutôt que dans une logique économique comme avant».

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Linda Cardinal

Malgré tout, la titulaire de la Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques met un bémol à la notion de «par et pour». «C’est une version très édulcorée dans la réalité. Il y a eu certes un travail de consultation et de collaboration, mais ce que les communautés veulent, c’est avoir le contrôle des orientations. Ce n’est pas la même chose. Le principe de subsidiarité n’est pas dans le plan.»

Investissements directs

Les organismes communautaires ont été entendus: les investissements se feront directement, sans passer par des transferts provinciaux. Aussi, tous les organismes soutenus présentement par Patrimoine canadien recevront une bonification de leurs financements, et ce dès le 1er avril.

«C’était nécessaire. Ça faisait dix ans que les enveloppes n’avaient pas bougé alors que tout est à la hausse», relève Martin Théberge.

Plus de 11 millions $ seront investis pour faire passer à 21,2 millions $ le financement d’activités culturelles locales via le Fonds d’action culturelle communautaire. «Le gouvernement a reconnu le secteur des arts, cultures et industries culturelles comme étant l’un des vecteurs du développement de nos communautés», se félicite le président de la FCCF.

Culture et médias

De plus, le Plan d’action renouvèlera l’entente multipartite avec le lancement du corridor touristique et patrimonial pancanadien, l’augmentation du financement de Radio-Canada et de nouveaux investissements pour des agences culturelles telles que le Conseil des arts, le Centre national des arts, l’Office national du film, et le Fonds des médias. Tout cela compte pour des centaines de millions de dollars.

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«La culture joue un rôle primordial. C’est l’identité d’un peuple, et c’est aussi un vecteur d’intégration pour les nouveaux arrivants», exprime Martin Théberge.

langues officielles
Le financement fédéral des programmes associés à la promotion des langues officielles en milieu minoritaire.

Investissement ou action?

Linda Cardinal n’est pas très inspirée par le Plan d’action qui, pour elle, s’apparente bien plus à un plan d’investissement. «Ça ressemble plus à un catalogue, une liste d’investissements, sans trop de détails. On le lit comme un budget», regrette-t-elle.

Pour la professeure, le plan manque de cohérence. «Je m’attendais à quelque chose de plus fort et de mieux coordonné. Il manque une vision, des orientations, des objectifs précis et mesurables», analyse l’experte. Elle reproche aussi l’absence d’actions concrètes et aimerait trouver «un plan d’action pour la fonction publique».

Malgré tout, la plupart des parties prenantes sont emballées par le Plan d’action. Mais plusieurs restent prudentes. «La balle est dans notre cour. C’est à nous de bien agir et démontrer le bienfondé de ces investissements», insiste Jean Johnson. «C’est loin d’être la fin du travail», conclut Martin Théberge.

Auteur

  • Lucas Pilleri

    Journaliste à Francopresse, le média d’information numérique au service des identités multiples de la francophonie canadienne, qui gère son propre réseau de journalistes et travaille de concert avec le réseau de l'Association de la presse francophone.

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