Un moment de grâce en compagnie de Viola Léger

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Publié 19/03/2007 par Julie Burelle

Quand on a le bonheur de s’entretenir avec Viola Léger, on comprend tout de suite pourquoi cette grande dame du théâtre a une carrière aussi longue et prolifique. Avec la Sagouine et Évangéline Deusse, Viola Léger a en effet créé des personnages qui ont marqué l’imaginaire populaire depuis plus de 30 ans. Généreuse et enjouée, la comédienne acadienne parle avec amour de son métier et de la pièce Grace et Gloria qu’elle viendra présenter au Théâtre français de Toronto du 21 mars au 1er avril prochain.

Grace et Gloria est une comédie dramatique de l’auteur américain Tom Ziegler dont la traduction est signée Michel Tremblay. Montée en 1999 à Montréal puis en 2006 dans l’Outaouais, la pièce joue partout à guichets fermés. Sa dernière mouture, une coproduction du Théâtre de l’Île de Gatineau et du Théâtre Populaire d’Acadie de Caraquet a été couronnée du Prix du public au dernier Gala des Masques.

«La preuve est faite», de dire Viola Léger qui interprète le rôle de Grace depuis 1999. «C’est une pièce terriblement belle qui parle de la vraie vie et de la mort. Moi, j’aimais la pièce mais au bout du compte, c’est le public qui décide et il a décidé d’aller avec nous.»

«La vieille Grace est un peu haïssable», explique Mme Léger avec un sourire dans la voix. «Elle a honte face à la déchéance de son corps. La perte d’autonomie, c’est humiliant. Elle ne veut pas mourir à l’hôpital; elle veut rentrer chez elle». Chez elle, c’est les Blue Ridge Mountains de Virginie, un coin de pays qui est en train d’être remodelé par les camions de construction et la modernité. «Mais l’hôpital décide d’envoyer Gloria pour l’aider», explique la comédienne.

Le personnage de Gloria est interprété dans cette production par Danielle Grégoire dont Madame Léger ne dit que du bien. «On fait un bon couple! Je dis toujours que la vraie pièce, c’est Gloria» explique-t-elle. «Gloria se cache derrière son travail pour éviter quelque chose».

Les plans et les derniers jours de Grace se trouvent donc bousculés par l’arrivée de cette jeune femme. «Ce sont deux personnages opposés : l’une est jeune, l’autre vieille, l’une est riche, l’autre pauvre, l’une est de la ville, l’autre de la campagne… Mais elles vont découvrir ce qui les unit» explique la comédienne. Grace et Gloria vont apprivoiser la mort ensemble. «C’est compris qu’à un certain âge, on accepte qu’on va mourir, mais quelques heures plus tard, on peut douter un petit brin. La mort, c’est quelque chose qui se termine pour la personne qui part mais aussi pour celle qui reste»

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Cet apprivoisement mutuel, ce cheminement commun se fait, dans Grace et Gloria, «sans discours moralisateur», explique Viola Léger. «Ça n’aurait pas marché. Ni Grace ni Gloria n’aurait accepté ça. C’est dans les petits gestes de la vraie vie de tous les jours que ça se passe». C’est peut-être d’ailleurs ce qui explique la réaction si forte du public face à la pièce. «Il y a des soirs où ça pleure beaucoup dans la salle. Les gens se reconnaissent et c’est comme une catharsis», poursuit la comédienne.

Viola Léger a joué le rôle de Grace près de 200 fois lors de sa création et le 18 mars prochain marquera la centième représentation de la deuxième production. Comment arrive-t-elle à se renouveler chaque soir? «Le texte et le personnage restent, c’est l’interprète qui change avec la vie qui passe. La compréhension du personnage s’approfondit. Le théâtre, c’est dans le présent, chaque soirée est unique; le public n’est jamais le même», explique la comédienne dont la voix trahit un amour profond pour son métier et pour le public qui lui est fidèle.

La fidélité est un terme qui décrit d’ailleurs très bien le parcours de Mme Léger, interprète la Sagouine depuis 1971. Cette fidélité est réciproque: on a attendu la comédienne près de deux ans pour le rôle de Grace. «À l’époque, j’étais sénatrice et je ne jouais que si l’on ne siégeait pas. Je ne suis pas multitask moi, je n’en suis pas capable. J’aime aller en profondeur dans ce que je fais». Viola Léger a donc attendu de prendre sa retraite du Sénat pour remonter sur scène, pour son plus grand plaisir et le nôtre.

Grace et Gloria, de Tom Ziegler, mise en scène de Sylvie Dufour, avec Viola Léger et Danielle Grégoire au Théâtre français de Toronto du 21 mars au 1er avril 2007.

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