Un Carrefour francophone au bord du lac

L’Université de l’Ontario français vise 3000 étudiants d’ici une quinzaine d’années

Le secteur riverain de l'Est du centre-ville de Toronto est privilégié par le comité de planification de l'université franco-ontarienne. (Illustration: un des projets de Waterfront Toronto)
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Publié 28/08/2017 par François Bergeron

Le gouvernement libéral de Kathleen Wynne entend accepter les recommandations clés du rapport de Dyane Adam et présenter, dans les mois à venir, un projet de loi afin de créer une université de langue française, dont le campus serait situé dans le secteur riverain Est du centre-ville de Toronto.

«Il s’agit d’un jalon historique pour l’éducation postsecondaire en français en Ontario», a fait valoir la ministre des Affaires francophones, Marie-France Lalonde, ce lundi 28 août, après avoir rendu public le rapport du Conseil de planification pour une université de langue française (CPUFO) qu’elle examinait depuis juin.

Le gouvernement de l’Ontario proposera de créer «une toute nouvelle université de langue française, la première de son genre dans la province», aux programmes «décloisonnés» et «transdisciplinaires».

Le rapport du comité présidé par Dyane Adam.
Le rapport du comité présidé par Dyane Adam.

2020

C’est possiblement dès 2020 qu’une université de langue française «de taille modeste» pourrait accueillir sa première cohorte d’étudiants à Toronto, a indiqué Dyane Adam.

On parle de quelques centaines d’étudiants et d’une vingtaine de profs au début, d’un millier d’étudiants et d’une cinquantaine de profs deux ou trois ans plus tard, et du double dix ans plus tard.

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Le nouvel établissement – qui s’appellerait «l’Université de l’Ontario français», bien que dans le rapport on dit «l’Université de langue française» – partagerait des locaux et du personnel avec le Collège Boréal, qui doit absolument quitter le 3e étage du 1 rue Yonge et se trouver un nouveau campus d’ici 2020. Le Groupe Média TFO deviendrait également partenaire du projet.

Waterfront

Le Collège Boréal est déjà associé au vieux projet de Maison de la francophonie torontoise, qui promet des locaux à loyers modiques à divers organismes francophones au centre-ville, mais qui pourrait maintenant s’occuper aussi des résidences étudiantes. Tout cela deviendrait un «Carrefour francophone» au bord du lac.

Les membres du CPUFO ont rencontré les dirigeants de Waterfront Toronto (créé par les trois ordres de gouvernement) qui se sont montrés intéressés à la proposition de l’Université, du Collège Boréal et de leurs partenaires éducatifs, créatifs et professionnels «qui partageraient un espace dans ce qui est désigné comme le couloir d’innovation de Toronto».

Le CPUFO estime à plus de 80 millions $ les coûts de démarrage de l’Université de l’Ontario français (on souhaite que le fédéral en finance la moitié) et à 40 millions $ ses coûts d’opération annuels.

Dyane Adam
Dyane Adam

Réseau provincial

Dyane Adam propose un système de parrainage avec d’autres universités pour les premières années, notamment avec Ryerson et l’Université d’Ottawa. Éventuellement, un réseau universitaire de langue française affilié à la nouvelle institution «rayonnerait dans le Centre-Sud-Ouest, le Nord et l’Est de la province».

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C’est ainsi que ce projet «d’envergure régionale au départ, a pris une dimension provinciale», explique Dyane Adam, qui dit avoir consulté «les universités bilingues et d’autres universités de l’Ontario, du Québec et de l’étranger».

Le nouveau campus torontois créerait un «milieu résolument français, dynamique et immersif pour ses étudiants»… un «carrefour francophone du savoir et de l’innovation».

À l’heure actuelle, 22 000 jeunes étudient entièrement ou partiellement en français dans dix institutions postsecondaires de la province: deux collèges communautaires francos (Boréal à Sudbury et La Cité à Ottawa, qui ont tous deux des antennes à Toronto et ailleurs), l’université francophone de Hearst, le campus bilingue Glendon de l’Université York à Toronto, l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario (Université de Toronto), les universités bilingues de Sudbury, Laurentienne (à Sudbury), d’Ottawa, Saint-Paul (à Ottawa) et le Collège universitaire dominicain (à Ottawa). Les collèges communautaires et universités de langue anglaise attirent encore la majorité des jeunes Franco-Ontariens. Certains d’entre eux vont aussi étudier en français au Québec.

Transdisciplinarité

Quant aux programmes qui seraient offerts par la nouvelle institution à Toronto, on ciblerait d’abord des secteurs qui peineraient actuellement à recruter des francophones: éducation, santé, finances, commerce, communications et technologie, administration et fonction publique.

Éventuellement, on souhaiterait couvrir tous les domaines d’études, notamment en lien avec les autres partenaires.

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Le rapport propose un «changement de paradigme»: favoriser la recherche et l’enseignement «décloisonnés», sans départements, où les étudiants accéderaient à une grande quantité d’information tout en apprenant «à savoir quoi en faire» face aux «grandes problématiques sociales du 21e siècle: pluralité humaine, environnement urbain, économie mondialisé et cultures numériques». On appelle ça de la «transdisciplinarité»…

Dans son projet de loi (promis avant les élections de juin 2018), le gouvernement devra créer l’entité légale de l’Université et sa structure de gouvernance, afin qu’un comité de transition puisse commencer à recruter son personnel.

Estimation des revenus et de leurs sources au cours de la première décennie de la nouvelle université franco-ontarienne.
Estimation des revenus et de leurs sources au cours de la première décennie de la nouvelle université franco-ontarienne.

Prudence

Le mouvement associatif réclame une université «par et pour» les Franco-Ontariens depuis plusieurs années.

Des «États généraux» sur cet enjeu ont précisé cette revendication en 2014 et, l’automne dernier, Dyane Adam, ancienne principale de Glendon et ancienne commissaire aux langues officielles du Canada, a été chargée de proposer un modèle au gouvernement provincial.

Bien que l’AFO, le RÉFO, la FESFO et d’autres intervenants veulent une université franco couvrant toute la province, c’est d’abord Toronto et le Centre-Sud-Ouest de la province – où seulement 3% des jeunes francophones poursuivent leurs études postsecondaires en français – qu’a toujours ciblé le comité de Dyane Adam.

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«C’est aussi la seule région qui connaît un accroissement appréciable de sa population de langue française», souligne-t-on.

Les porte-parole des organismes franco-ontariens ont réagi positivement, mais prudemment, au rapport Adam et à l’ouverture du gouvernement, se réservant du temps pour le lire, en discuter et commenter davantage dans les prochains jours.

La nouvelle université de l'Ontario français aurait une vocation fédérative.
La nouvelle université de l’Ontario français aurait une vocation fédérative.

Dans les médias :

Radio-Canada : Les universités bilingues ontariennes ne craignent pas l’arrivée d’un nouveau joueur

Radio-Canada : Nouvelle université : des associations francophones se réjouissent

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TFO #ONfr : Rapport Adam: prudence des francophones, enthousiasme de Lalonde

Le Droit : Université de l’Ontario français: l’absence de fonds déplorée

Le Droit : Université franco: un pas décisif

À noter : Dyane Adam sera la conférencière au déjeuner-causerie du Club canadien de Toronto le mardi 19 septembre.

À lire aussi : Des réactions de Carol Jolin, Daniel Giroux, Donald Ipperciel, Richard Kempler, François Boileau.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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