Rêver entre ciel et mer à Samana

République Dominicaine

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Publié 25/09/2017 par Aurélie Resch

À l’entrée de la grotte La Arena, la sculpture taïna me regarde de ses grands yeux. «Que me dis-tu?». Le vent qui agite les feuilles des palmiers emporte ma question. Ici, on ne parle pas. On vit. On respire.

Je me déplace pour m’asseoir à côté de la tête sculptée dans la roche et regarde dans la même direction qu’elle. Je vois du bleu et du vert. J’entends les vagues de l’océan et le cri des oiseaux. Je distingue la forêt dans un désordre émeraude et l’or du sable qui la sépare de l’océan.

On m’avait parlé de l’authenticité de la péninsule de Samana, en République dominicaine. En faire l’expérience change les perspectives et étire le temps.

Tout au sud de l’île, au large des côtes à la sortie de la Baie, le parc national Los Haitises («le pays des montagnes») s’étend sur 1600 km2 et abrite des colonies d’oiseaux (aigrettes, frégates, pélicans, vautours, hérons…) venus se poser et se reproduire. Je m’émerveille de leur vol gracieux entre les îlots et d’apercevoir des nouveau-nés dans les branches.

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Refuge des Taïnos

C’est ici que sont venus se réfugier les Taïnos, venus du Vénézuéla dans la Province de Samana pour mener une existence sereine faite de chants, de pêche et de culture.

Hélas, les conquistadores arrivant, il ne faudra que 50 ans pour que la civilisation disparaisse entièrement. Afin d’échapper aux massacres et à l’esclavage, les Taïnos se sont repliés dans des grottes à l’intérieur du parc. Certaines portent encore leurs traces (sculptures, peintures, gravures).

Mais, non protégées, celles-ci s’effacent avec le temps et je m’attriste de savoir que les futures générations ne connaîtront pas cet héritage. Les Taïnos croyaient en la réincarnation et vénéraient les oiseaux.

Certaines familles, pour accéder à une vie qu’elles espéraient meilleure, se sont collectivement suicidées pour ne pas tomber sous l’emprise des Espagnols.

Les parois des grottes Saint Grabriel et La Linea révèlent des scènes de pêche, des oiseaux et des masques vénérés.

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Plages

Comme eux, je prendrai souvent la mer pour parcourir cette partie de l’île. Je verrai les dauphins jouer autour de mon petit bateau, et je serai heureuse de toucher terre quand les plages qui s’offrent à moi déploieront leur palette de bleus.

Parmi toutes, je retiens la Playa Fronton, au pied de sa grande falaise. Elle répond à mes aspirations de solitude et de vie à la Robinson Crusoé. Eaux turquoises, roches abritant poissons paresseux et petits crabes, c’est là que je me perdrai plusieurs heures.

La Playa Coson est mon coup de cœur. D’une beauté classique, elle offre une ligne de sable doré de plusieurs kilomètres entre palmiers et eaux limpides. Les Dominicains viennent s’y baigner et c’est un plaisir de partager leurs rires et bonheurs.

Je recommande la baignade en matinée. La lumière y est belle et la marée basse. Le soir, marcher pieds nus sur le sable tout en contemplant le soleil se coucher est un pur délice.

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La mer est porteuse de rêves, de promesses, de nourriture aussi. Elle fait partie intégrante de la vie des habitants depuis les Taïnos jusqu’aux dominicains d’aujourd’hui. Elle grignote pourtant malheureusement chaque année, depuis dix ans, 1m de plage, et nombreux dans le pays sont ceux qui désespèrent à voir leur littoral rongé ainsi par les flots.

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Forêts

Si je me laisse facilement envoûter par le bleu turquoise de l’océan, je suis tout aussi séduite par le vert émeraude des forêts denses de la péninsule. S’y cachent des villages colorés, des plantations de café et de cacao, des lézards, des fruits, des fleurs, des herbes odorantes.

C’est à cheval que je pars à la découverte de la cascade El Limon. Cette partie montagneuse de la péninsule renferme dans son poumon vert des chutes hautes de 50m. On grimpe ferme au milieu de cocotiers, d’orangers, de citronniers, d’arbres à café, cacao, ananas, avocats.

On se laisse étourdir par tout ce vert parfois piqueté de fleurs aux couleurs vives dont les pétales pour certaines guérissent les maux d’estomac, comme me l’expliquera Oscar, mon guide. Après avoir traversé une petite rivière, je laisse ma monture se reposer pour descendre à pied vers la cascade. Une invitation à la baignade.

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Difficile de s’approcher trop près à la nage des chutes tant la pression est forte. Je regarde les jeunes du coin sauter du haut des rochers et me demande si les Taïnos faisaient de même. Je cherche à savoir si une légende raconte l’histoire de la cascade El Limon (citron). On ne me répond pas. Encore une fois, j’apprendrai qu’ici, on vit, on respire, on sourit.

La forêt n’en finit pas de surprendre et offre de nombreuses opportunités de randonnées à pied, à cheval ou en quad. Les plus courageux tenteront d’en survoler une partie en tyrolienne à 150m ou 300m de haut, selon le choix.

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La Terrenas

En contraste, en ville, à La Terrenas, on est plus bruyant. Mais se raconte-t-on pour autant ? On échange pour acheter ou vendre ou séduire, mais les peintres (tous Haïtiens) œuvrent en silence.

Ici, cultures et langues se mélangent joyeusement. Les musiques sont autant latines, que faites de percussions africaines ou de tubes occidentaux. Des Dominicains à la peau sombre tapent dans le dos de locaux blancs aux yeux verts. J’entends parler espagnol et français, je vois des restaurants italiens et des boulangeries belges, j’observe des Québécois boire des piña colada et jus de mangue en terrasse.

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Nicolas, propriétaire d’une agence réceptive «Flora Tours» me fait remarquer qu’ici Indiens, Espagnols, Africains, blancs se sont mêlés, offrant une population des plus disparates. «D’ailleurs, les poupées que vous trouverez dans les magasins ou les peintures représentant les Dominicains sont sans traits. Les figures sont noires, car nous vivons tous au soleil et avons ainsi à un degré divers la peau foncée, mais les yeux, le nez, la bouche et les cheveux sont absents, car il n’y pas de «type» pour nous représenter.»

La vie semble trépidante: klaxons de motos, rires, injonctions, concentration de gens et de couleurs… La vie à Las Terrenas diffère de celle des campagnes que j’ai vue sur ma route. Mais la jovialité, le plaisir de partager un repas entre amis ou en famille est identique et la vie nocturne est souvent un temps de fête.

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Mariages mixtes

C’est à pied et en moto que je partirai à la rencontre des gens. Que je découvrirai qu’à côté d’un mode de vie traditionnel dans les villages de campagne, dans les villes plus importantes, les mariages sont mixtes entre locaux et étrangers, que les gens n’ont pas (pour beaucoup) un niveau de vie élevé, qu’ils circulent davantage en moto qu’en voiture, que beaucoup de ceux qui travaillent à Las Terrenas ou dans les hôtels aux alentours viennent d’autres régions de la République dominicaine, de l’étranger ou de Haïti.

D’ailleurs Haïti…? Chut. Ici on ne parle pas. On vit. On respire. On sourit.

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J’échange un signe de tête par-dessus mon jus de coco avec un vieux monsieur qui fume le cigare de l’autre côté de la route. Un chat saute sur ma table, curieux. Les premières gouttes de pluie tombent. Les nuages se sont amassés, il est temps de se mettre à l’abri.


Venir : Air Transat et Air Canada assurent des liaisons directes entre Toronto et la Samana.

Où dormir? Viva Wyndham V offre un havre de paix, chic et décontracté, en bordure de la très belle plage de Coson. Des soins spécifiques avec produits naturels à base de lait de coco sont à découvrir au Coconut Whispers Spa et des activités sont proposées tout au long de la journée et de la soirée.

Excursions : Les agences qui les proposent sont légion. Flora Tours, tenue par Nicolas vous emmène découvrir le parc national de Los Haitises, la cascade El Limon, les plus belles plages de la péninsule et la vie des gens en campagne (en quad).

Transferts et bons plans : Colonial Tours vous emmène partout à travers le pays, vers un aéroport ou un hôtel. Demandez à parler à la très sympathique Olga, véritable mine d’informations sur la destination.

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Équitation : Rancho Playa propose des excursions à cheval accompagnées de 1h ou 2h sur la plage et dans la campagne.


À noter que la République dominicaine, comme Haïti, n’a pas trop souffert des orgagans des dernières semaines dans le golfe du Mexique et les Caraïbes.

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Auteur

  • Aurélie Resch

    Chroniqueuse voyages. Écrivaine, journaliste, scénariste. Collabore à diverses revues culturelles. Réalise des documentaires pour des télévisions francophones. Anime des ateliers d’écriture dans les écoles, les salons du livre et les centres culturels.

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