Non, l’immigration n’est pas en croissance rapide

L’immigration est devenue un enjeu électoral dans plusieurs pays, voire une obsession pour certains gouvernements. Pourtant, une recherche quantitative permet d'entrer en contradiction avec tous ces discours alarmistes.
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Publié 19/10/2018 par Laurie Noreau

L’immigration est devenue un enjeu électoral dans plusieurs pays, voire une obsession pour certains gouvernements. Pourtant, une recherche quantitative permet d’entrer en contradiction avec tous ces discours alarmistes.

Taux de rétention

Toute statistique sur le nombre « d’immigrants » par année dans un pays reflète mal la situation : elle calcule pêle-mêle tous ceux qui ont franchi la frontière, mais ne tient pas compte du fait qu’un grand nombre ne resteront que quelques mois ou quelques années (c’est ce qu’on appelle parfois le «taux de rétention») et que plusieurs demanderont un statut qui leur sera refusé.

Le statut de résident permenent est plus représentatif

Pour avoir une idée plus juste de la situation, il est plus judicieux de commencer par aller chercher le nombre de gens qui ont obtenu, chaque année depuis 2006, leur statut de résident permanent : un statut qui traduit mieux la réalité de l’immigration, puisqu’il témoigne de la volonté de s’installer pour de bon dans le nouveau pays.

La plupart des pays offrent un statut de résident permanent : c’est un statut qui permet de vivre et de travailler dans le pays d’accueil indéfiniment.

En s’arretant quelques instants sur les données chiffrées de quatre pays — le Canada, les États-Unis, la France et l’Italie — nous disposons d’une base de comparaison intéréssante. Ces derniers ont été choisis parce qu’à des degrés divers, ils ont tous été marqués par des débats épineux sur l’immigration ces dernières années.

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  1. Résidents permanents : pas de croissance notable

Infographies : Normand Bastien
Evolution du nombre de résidents permanents totaux entre 2006 et 2016. Infographies: Normand Bastien.

Entre 2006 et 2016, le nombre de résidents permanents au Canada est passé de 251 600 à 296 300, soit une augmentation de 15 % sur 10 ans. C’est inférieur à la France, où la croissance a été de 22 % sur 10 ans.

En comparaison, l’augmentation de la population canadienne pendant la même période a été de 10 % (pour atteindre 35 151 728 au recensement de 2016).

L’Italie est le seul de nos quatre pays qui connaît une baisse sensible du nombre de nouveaux résidents permanents pendant toute cette décennie. Pourtant, c’est ce même pays qui a élu en mars un gouvernement d’extrême-droite, au terme d’une campagne électorale fortement marquée par les craintes liées à l’immigration.

Les États-Unis sont quant à eux dans une position mitoyenne : une hausse plus rapide que les trois autres pays entre 2013 et 2016 (19 %). Mais cette hausse, en 2016, avec 1 183 505 personnes, les laissait encore en-dessous du seuil de 2006 (1 266 129).

2) Demandes d’asiles : un phénomène européen d’abord

Les immigrants qui ont fait le plus parler d’eux ces dernières années sont les réfugiés et les demandeurs d’asile.

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Infographies: Normand Bastien
Évolution du nombre de demandeurs d’asile entre 2006 et 2017. Infographies: Normand Bastien.

Ainsi, au cours de la dernière décennie, on a observé une croissance plus nette dans le nombre total de demandes d’asile — c’est-à-dire ceux qui ont fait une demande, mais qui sont encore en attente de savoir s’ils seront acceptés.

Une hausse est observée dans les quatre pays depuis le début des années 2010, ou depuis 2013 au Canada. Cette hausse est beaucoup plus prononcée en France et en Italie qu’au Canada et aux États-Unis (ce dernier est le seul des quatre pays dont on ne disposait pas encore de données pour 2017 au moment de notre recherche).

Le Canada n’est revenu qu’en 2017 au pic qui avait été atteint 10 ans plus tôt.

3) Demandeurs d’asile : plus d’appelés que d’élus

Toutefois, il faut se rappeler qu’une fois qu’un demandeur d’asile passe la frontière, un long chemin de croix commence pour lui : non seulement les demandes ne seront-elles pas toutes acceptées, mais en plus, les délais varient d’un pays à l’autre.

Le pourcentage d’acceptation de la demande d’asile varie lui aussi d’un pays à l’autre. Un peu plus du quart (29,4 %) ont été acceptés en France en 2017 alors qu’en Italie, le taux était de 41 %. Au Canada, entre 2014 et 2017, le taux d’acceptation a varié entre 60 et 63 %.

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4) Demandeurs d’asile : infimes par rapport aux résidents permanents

Or, l’espace médiatique occupé par les demandeurs d’asile est disproportionné par rapport à leur poids démographique, révèlent les données chiffrées.

Chacun des tableaux suivants montre, en gris, le total des résidents permanents (c’est-à-dire ceux qui étaient calculés au début de ce texte) et en rouge, le total des demandeurs d’asile acceptés entre 2006 et 2016.

Dans le cas canadien, les données sur les demandes d’asiles acceptées ne sont disponibles qu’à partir de 2013.

Infographies: Normand Bastien
Résidences permanentes et demandes d’asile acceptées. Infographies: Normand Bastien.

Auteur

  • Laurie Noreau

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. la seule agence de presse scientifique au Canada et La seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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