Le mégalodon toujours vivant? Un mythe aux dents longues

Trois fois plus gros qu’un requin blanc
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Publié 09/08/2018 par Ève Beaudin

Le film The Meg, mettant en scène une équipe de scientifiques coincée dans un sous-marin suite à l’attaque d’un requin géant, n’était pas encore sorti en salles que, déjà, ressurgissaient sur la toile des théories: plutôt que d’être disparu il y a deux millions d’années, le mégalodon vivrait encore au fond de quelque fosse sous-marine…

20 mètres de long

Le mégalodon a de quoi fait frémir: trois fois plus gros qu’un requin blanc et pouvant atteindre jusqu’à 20 mètres de long, cette espèce préhistorique possédait des dents de 12 cm et une mâchoire assez grande pour croquer un bateau!

Or, la rumeur qui veut que ce requin soit encore vivant n’est pas née avec le film d’horreur de cet été.

C’est une série de livres qui a inspiré les scénaristes et surtout, c’est la chaîne de télévision Discovery Channel qui a grandement contribué à la propagation du mythe, en diffusant deux faux documentaires sur le mégalodon, dans le cadre de son spécial annuel Shark Week.

L’un d’eux, Megalodon: The New Evidence (2014) mettait en scène un biologiste qui aurait découvert des indices de leur existence et montrait les images d’une prétendue attaque survenue au large de l’Afrique du Sud.

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Or, il n’était jamais clairement indiqué qu’il s’agissait d’une œuvre de fiction: le biologiste était un acteur, cette attaque n’avait jamais eu lieu et les photos étaient truquées. Résultat, la grande majorité des 4,8 millions de téléspectateurs y ont cru, selon un sondage effectué par Discovery.

Surfant sur la même vague, il se trouve aujourd’hui des dizaines de vidéos sur YouTube qui répandent l’idée que le mégalodon existe toujours, tapi dans les zones inexplorées des océans.

Disparu depuis des millions d’années

Selon les paléontologues, le mégalodon est apparu il y a environ 28 millions d’années, avant de s’éteindre il y a 2,5 millions d’années.

Ces estimations reposent sur les fossiles de mégalodons aujourd’hui recensés dans des bases de données internationales comme The Paleobiology Database. Sa disparition pourrait être due à l’arrivée progressive d’une ère glaciaire, ou à l’émergence de prédateurs concurrents en quête des mêmes sources de nourriture.

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Même si la cause est incertaine, la disparition de l’espèce fait l’unanimité chez les scientifiques.

«Il n’y a absolument aucun doute que le mégalodon est disparu!», lance le Dr David Shiffman, biologiste spécialisé en conservation des requins à l’Université Simon-Fraser de Colombie-Britannique. «Si un requin mangeant des baleines de 60 pieds de long existait toujours, il y aurait des preuves. Or, il n’y en a pas du tout!»

Survie impossible en eau profonde

Un contre-argument fréquent des «défenseurs» du mégalodon est que 95% des océans sont encore inexplorés. Même l’auteur de la série de livres The Meg, Steve Alten, utilise cet argument.

«Ce n’est pas parce que “les scientifiques ne savent pas tout”, que ça signifie que “n’importe quelle absurdité suggérée par n’importe qui est possible”!», réplique David Shiffman.

«Les mégalodons ne vivaient pas dans les eaux profondes, ils vivaient dans les zones côtières qui sont peu profondes. Ils n’étaient pas adaptés aux profondeurs et il n’y avait rien à manger pour eux dans ces zones. »

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«Dans les derniers volumes de The Meg, l’auteur avance que les baleines et les reptiles marins géants ont développé la capacité de vivre dans les profondeurs marines et de respirer à travers les branchies nouvellement développées. Non… ça ne se passe pas comme ça.»

Un divertissement

Le scientifique évitera-t-il d’aller voir le film? Au contraire. «Je vais aller voir le film et j’aime les livres — je suis même un personnage dans le quatrième tome. Ils sont amusants.»

«Le problème, c’est que certains ne réalisent pas que c’est de la science-fiction, un problème exacerbé par les faux documentaires de Discovery Channel»

«Des scientifiques — dont moi — et des responsables gouvernementaux ont été harcelés et même menacés par les téléspectateurs de Discovery qui croyaient que nous participions à un complot. Des années plus tard, je reçois encore des questions de personnes qui pensaient que c’était réel», confie M. Shiffman.

Requins bénéfiques

David Shiffman tient par ailleurs à rappeler que les populations de requins sont bénéfiques pour nous, puisqu’elles maintiennent l’équilibre des écosystèmes.

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«Les requins représentent rarement une menace pour l’humain. Plus de gens meurent en prenant des selfies et plus de personnes sont tuées par des machines distributrices que par des requins!»

Auteur

  • Ève Beaudin

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada et la seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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