HotDocs 2015: la force du documentaire

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Publié 21/04/2015 par Janine Messadié

Depuis 1993, le festival Hotdocs de Toronto présente une sélection des meilleurs documentaires d’ici et d’ailleurs, comprenant des œuvres récemment primées, des premières torontoises, canadiennes, internationales et mondiales. Cette année, 210 films issus de 45 pays, abordent des thématiques sociales et identitaires; environnementales et politiques; sportives, musicales et humoristiques.

En plus des projections cinématographiques dans douze différents programmes, le festival offre plusieurs activités parallèles, en présence de 186 cinéastes et invités de marque, venus des quatre coins du monde pour partager leur amour du documentaire, à travers des tables rondes, des discussions thématiques, des présentations spéciales et des projections interactives qui feront le bonheur des festivaliers.

Aperçu de cette 22e édition qui se tient du 23 avril au 3 mai 2015.

Le festival s’ouvre avec Tig, un portrait émouvant et inspirant sur Tig Notaro, une humoriste américaine originaire du Mississipi. En 2012, la comédienne avait ouvert sa performance avec ces quelques mots «Good evening, I have cancer». Le succès fut immédiat, la renommée aussi.

Les réalisatrices Kristina Goolsby et Ashley York (deux amies de Notaro), ont suivi la comédienne pendant un an, à partir de l’émission légendaire jusqu’à son retour sur scène. La projection du film se fera en présence des réalisatrices et de Tig Notaro, et sera suivie d’un Q &R (questions-réponses).

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Six autres films célébrant l’humour, font également partie de la programmation cette année, notamment le premier long-métrage documentaire de Howie Mandel, qui sera d’ailleurs à Toronto pour présenter Committed, portrait de Vic Cohen, un comique qui tente de trouver le succès à Hollywood.

Le film Monty Python: The Meaning of Live, du britannique Roger Graef Obe, nous propose de redécouvrir la légendaire troupe britannique, en compagnie des membres survivants de Monty Python: John Cleese, Terry Gilliam, Eric Idle, Terry Jones et Michael Palin.

Live From New York! de Bao Nguyen, quant à lui, explore les débuts de la célèbre émission Saturday Night Live, reflet de l’histoire américaine pendant 40 ans. Et Being Canadian de Rob Cohen, auteur canadien des séries télévisuelles (The Simpsons, The Big Bang Theory), propose un film drôle, sorte de quête épique sur l’identité nationale du Canada.

Rencontrée par L’Express, Charlotte Cook, la directrice de la programmation à Hotdocs, insiste sur la force du documentaire: «Le documentaire est un cinéma du réel…qui pose des questions et nous remet en question. Hotdocs veut rendre compte de la diversité de ce genre cinématographique, sa densité. Nous avons d’ailleurs inclus cette année plusieurs documentaires qui célèbrent la comédie dans un nouveau programme Show me the funny; c’est amusant et cela va certainement attirer un nouveau public qui ne se déplacerait autrement pour venir au festival. Montrer la variété de documentaires qui existent, et les différentes façons de raconter des histoires avec une cinématographie inventive et innovante, c’est ce que l’on recherche.»

Elle ajoute: «Nous avons reçu cette année 2,724 documentaires, reflet de l’émergence du documentaire, d’une culture documentaire parmi les artisans, les cinéastes et le grand public ; les 210 que nous avons sélectionnés, qui sont autant de regards sur le monde, ont été réalisés par 253 réalisateurs et de ce nombre 40% sont des femmes. C’est exceptionnel cette année.»

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Exceptionnelle aussi, la qualité des films qui nous sont proposés dans les différents programmes du festival notamment le Competitive Canadian Spectrum, ou l’on retrouve d’excellents documentaires, parmi lesquels Haida Gwaii: on the edge of the world, de Charles Wilkinson (Oil Sands Karaoke, Peace Out). Film inspirant, qui nous emmène au cœur de Haida Gwaii, archipel au large de la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique, où vivait dans la prospérité pendant plus de dix mille ans le peuple Haïda Gwaiian, jusqu’à ce qu’il soit décimé par la maladie, l’exploitation commerciale et la surpêche industrielle. Aujourd’hui, la nation Haïda se redresse pour préserver son territoire et dire non à l’exploitation forestière non durable et la surpêche.

Peut-on imaginer un monde sans oiseaux, questionne cette fois, The Messenger de Su Rynard. Ce film contemplatif explore le déclin des oiseaux chanteurs, dévastés par les périls imposés par l’homme. De la forêt boréale, à la base du Mont Ararat, en passant par les rues de New York, le film se veut un miroir de notre propre déclin.

No place to hide: The Rehtaeh Parsons Story de Rama Rau. En 2014, le Canada est devenu l’un des premiers pays à introduire la loi sur la cyber intimidation, aussi appelée loi de Rehtae. No place to hide, c’est l’histoire de cette adolescente de Halifax, Rehtaeh Parsons, qui a mis fin à sa vie le 7 Avril 2013, le suicide étant sa solution permanente à la cyber intimidation, une problématique des plus alarmantes.

Lowdown Tracks, de la Torontoise Shelly Saywell. Portrait de cinq itinérants qui sont aussi des musiciens de rue. C’est après avoir vu la musicienne torontoise Lorraine Segato inviter les sans-abri à monter sur scène pour jouer avec elle, lors d’un concert, que Saywell a décidé de faire ce film, proposant un regard neuf sur l’itinérance.

Présence francophone marquée

Durant les deux semaines du festival, on pourra voir de nombreux documentaires issus de la francophonie, ainsi que huit documentaires de l’ONF, dont cinq présentés en premières ontariennes. Entre autres:

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The Amina Profile (Le profil Amina), long métrage documentaire tourné comme un polar de Sophie Deraspe. Un film qui est tout à la fois, une histoire d’amour et une histoire de dérapage médiatique et sociologique sans précédent. (Esperamos Films et ONF).

Finding Macpherson (Le mystère Macpherson), film de Serge Giguère, qui suit la démarche de création d’une artiste sur une période de dix ans. Une coproduction Rapide-Blanc et ONF, récipiendaire du Jutra du meilleur long métrage documentaire, en mars dernier.

Danny, le portrait que font Justin Simms et William D. MacGillivray de l’ex premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, Danny Williams.

Seth’s Dominion (Le dominion de Seth) portrait animé de Luc Chamberland sur le grand bédéiste canadien Seth. Ce film a reçu le Grand prix du meilleur long métrage au Festival international d’animation d’Ottawa.

3D stréréocopique et réalité virtuelle

Hotdocs inaugure cette année le programme DocX, voué aux documentaires interactifs novateurs, nous donnant un aperçu de ce que pourrait être l’avenir du documentaire.

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Avec des lunettes Samsung Gear VR sur les yeux, et des écouteurs sur les oreilles, on pourra voyager à travers le passage du Nord-Ouest dans le film The Polar Sea 360 de Thomas Wallner; ou vivre, comme si on y était, une expérience de création en compagnie du chanteur Patrick Watson avec le film Strangers, du duo montréalais, Félix Lajeunesse et Paul Raphaël.

Avec Highrise: Universe Within, Live, cette fois, un événement participatif d’un soir tenu devant public, nous allons plonger dans les vies numériques secrètes des résidents des tours d’habitation du monde entier. Ce projet documentaire multimédia de l’ONF réalisé par Katerina Cizek, a récolté de nombreux prix à l’international ainsi que deux prix Écrans canadiens.

Rétrospectives 2015

Comme tous les ans, Hotdocs propose deux rétrospectives. La première, sur Carole Laganière, une cinéaste québécoise en mi-carrière au regard incisif, qui après des études de cinéma en Belgique, a d’abord touché au documentaire-fiction avant de réaliser les documentaires La fiancée de la vie, sur des enfants confrontés à la mort, et Un toit, un violon, la lune, sur un immeuble habité par des artistes à la retraite. Ces deux films ont remporté le Prix du meilleur documentaire canadien ici même à Hotdocs en 2002 et 2003.

La deuxième rendra un vibrant hommage à Patricio Guzman, grand cinéaste politique chilien qui depuis quarante ans, au travers de ses documentaires, nous raconte l’histoire contemporaine de son pays ; une histoire marquée par le coup d’Etat et la dictature du général Pinochet avec ses milliers de disparus et d’exilés. De La Bataille du Chili (1974/1979), sa trilogie inaugurale, à son dernier film mille fois primé, La Nostalgie de la Lumière (2010), c’est l’intégralité d’une œuvre à la fois documentée et profondément personnelle qui sera présentée. Hotdocs attribuera à ce passeur de mémoire le Outstanding Achievement Award.

Marché du documentaire

Afin d’encourager la diffusion du documentaire Hotdocs a aussi un volet marché, qui réunit plus de 2000 délégués de l’industrie du cinéma d’ici et d’ailleurs, qui prennent part à un large éventail d’évènements favorisant la formation, les échanges et le partage de connaissances. Avec des programmes intensifs d’ateliers professionnels – Hot Docs Deal Maker, Doc Shop, Hot Docs Forum, ainsi que l’International Co-Production Day – tout est mis en œuvre pour stimuler le développement de partenariats, faciliter les co-productions entre producteurs canadiens et internationaux et stimuler le dialogue entre les cultures.

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Avec un nombre record de 192,000 participants en 2014, parions que cette 22e édition sera tout aussi triomphante!

Pour de l’info sur les autres programmes du festival: Competitive World Spectrum, Competitive International Spectrum, Next, Screen on screen, Nightvision, Redux, Big Ideas et le volet Made in India: www.hotdocs.ca

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Auteur

  • Janine Messadié

    Communicatrice d'une grande polyvalence. 30 ans de journalisme et de présence sur les ondes de Radio-Canada et diverses stations privées de radio et de télévision du Québec et de l’Ontario français. Écrit depuis toujours...

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