Explosion de folie au carnaval de Trinidad

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Publié 27/02/2006 par Marta Dolecki

S’échappant de chars gigantesques, la musique est puissante et pénètre le corps, comparable aux vibrations d’un cœur qui bat la chamade. Envahis par une fièvre euphorique, les festivaliers se laissent emporter dans des danses lascives au rythme des steel bands, de la soca et du calypso. Dans les rues, le profane se mêle au religieux. Des diables armés de fourches croisent des jeunes femmes vêtues de bikinis verts, jaunes, rouges, ornés de paillettes, de perles nacrées et de plumes d’autruche. Les colliers qu’elles portent autour du cou brillent comme autant de petites pépites au soleil des Caraïbes.

La magie du carnaval souffle le long des rues de Port of Spain. Chaque année, au mois de février, les îles de Trinité-et-Tobago, situées au large de la pointe Est du Venezuela, vibrent au son de cette fête qui compte parmi les plus colorées de la planète.

Le carnaval des îles de la Trinité n’a rien à envier à son cousin, le fastueux carnaval de Rio ou encore à celui, plus modeste, de La Nouvelle-Orléans. Tous les ans, environ 50 000 touristes viennent se joindre aux 150 000 locaux pour une bacchanale endiablée qui dure plusieurs jours d’affilée.

Le carnaval des îles de la Trinité est d’ailleurs l’ancêtre de nombreux carnavals d’Amérique du Nord, notamment la Caribana à Toronto. Pendant une semaine, certaines rues de la capitale se ferment à la circulation. L’île se pare alors de ses plus beaux atours. La population ne dort pas, ou presque, bien trop occupée à participer aux différentes mascarades. Le carnaval devient ainsi l’opium du peuple, une fête libératrice qui permet d’abolir les barrières de rang, de sexe et de classe entre les différents citoyens.

Qu’il soit un oiseau du paradis, un voleur de minuit, un pierrot grenade, ou encore un diable impie, tout le monde est égal, une fois paré de son costume. Les Trinidadiens rivalisent de créativité à l’occasion du carnaval. Ils s’improvisent musiciens, cuisiniers, couturiers, créant et confectionnant, souvent des mois à l’avance, les déguisements qui viendront habiller les danseurs.

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Les habitants de l’île ont le carnaval très à cœur. Ils prennent le temps d’énumérer les costumes, anciens et nouveaux, et expliquent aux visiteurs toutes les coutumes allant de pair avec les festivités. Pour eux, le carnaval est le ciment de l’identité nationale et ils en tirent une grande fierté.

Les origines françaises du carnaval

Sur invitation des Espagnols qui craignaient que la colonie ne leur échappe, les premiers colons catholiques français sont arrivés dans l’île de la Trinité à la fin du XVIIIe siècle. Ils ont apporté avec eux la tradition du carnaval, improvisant des bals costumés et des fêtes somptueuses avant le Carême, temps d’abstinence et de jeûne.

Les esclaves qui travaillaient à l’époque dans les plantations de cacao et de café ont commencé à parodier leurs maîtres, organisant à leur tour des fêtes secrètes qui, pour un temps, leur permettaient d’oublier le joug de l’esclavage.

Aujourd’hui, le carnaval de l’île conserve la trace de cet héritage. Des personnages tels que dame lorraine, le nègre jardin ou encore pierrot grenade sont les survivants de cette époque et viennent se mêler à la masse des festivaliers qui arborent leurs costumes colorés.

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Carnet de bord du festivalier

Chaque année, les festivités organisées sur l’île suivent le calendrier du Carême. Pendant la dernière semaine qui précède le jeûne, les activités sont organisées de façon à faire monter la tension chaque jour un peu plus.

Le samedi précédant le Mercredi des cendres a lieu le carnaval des enfants. D’adorables bambins, certains à peine âgés de trois ou quatre ans et qui tiennent à peine debout, paradent le long des rues, vêtus de costumes de guerriers ou bien encore de robes de mariées.

Quand elle était jeune, Rosalind Gabriel n’avait pas le droit de prendre part aux festivités entourant le carnaval, parce que sa famille, qui était assez stricte, le lui interdisait. Elle s’est depuis bien rattrapée. Mme Gabriel a commencé par confectionner des costumes pour ses propres enfants en les faisant participer au carnaval. C’était il y a environ 30 ans. Depuis, elle est connue dans toute l’île comme l’une des meilleures designers de costumes pour enfants.

Dans l’atelier qu’elle occupe, ses nouvelles confections rivalisent de créativité. Des ouvrières aux doigts de fée s’affairent dans l’arrière-boutique pour terminer à temps les créations qui viendront habiller les enfants. La coquetterie n’a pas d’âge, note Rosalind Gabriel, qui explique que les enfants, eux aussi, désirent impressionner la foule en arborant leurs plus beaux atours.

Le jour suivant, lors du Dimanche gras, on procède à l’élection d’une reine et d’un roi du carnaval. Cette année, c’est un Torontois de 36 ans, Curtis Eustace, qui a ravi le titre suprême. Le carnaval, c’est pour le jeune homme une affaire de famille. Son propre père a été sacré roi du carnaval pendant 20 ans. Depuis, Curtis perpétue la tradition et compte bien transmettre un jour sa passion à son jeune fils.

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Le lundi, aux petites heures du matin, les célébrations du carnaval reprennent de plus belle avec Jouvert – Jour Ouvert en français – la période où les forces du bien et les forces du mal se mélangent et coexistent ensemble main dans la main. À l’aube, des hordes de carnavaliers se réveillent pour aller danser dans les rues de Port of Spain. Les participants se couvrent d’huile, de boue, de peinture, de chocolat et de paillettes, et défilent ainsi jusqu’à 10h du matin.

Arrive enfin le Mardi gras, point culminant du carnaval. Les rues de la capitale sont noires de monde et voient défiler des bands costumés qui ont pour nom Poison, Tribe ou encore les Trini Revellers. Certains peuvent compter jusqu’à plusieurs milliers de membres répartis dans différentes sections.

Les carnavaliers progressent jusqu’à l’amphithéâtre de la Savannah où ils seront jugés sur leur présentation et leurs costumes. Les fêtes se poursuivent jusqu’à minuit, heure à laquelle il convient d’éteindre les feux.

Enfin, le Mercredi des cendres, c’est jour de repos, l’occasion parfaite d’aller faire un saut chez la voisine Tobago pour se reposer sur l’une de ses nombreuses plages immaculées… avant le retour des festivités l’année prochaine.

Le carnaval de Trinidad a lieu cette année du 26 au 28 février. Un calendrier complet des activités est disponible sur le site Internet de l’office de tourisme des îles de Trinité-et-Tobago à l’adresse: http://www.visittnt.com/codn2k5/default.asp. Les festivaliers qui souhaitent participer au carnaval peuvent se procurer des costumes en se rendant sur le site Internet des différentes bands tels Poison (http://www.poison.co.tt/), les Trini Revellers (http://www.revellers.com/) ou encore le band Harts (http://www.hartscarnival/). Un costume complet coûte une moyenne de 250 $. Il est conseillé de réserver son billet d’avion et sa chambre d’hôtel dès maintenant, parce que l’île est toujours prise d’assaut lors du carnaval.

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