Des mots français au pays de Shakespeare… comme «cul-de-sac»

cul-de-sac
Curieusement, les Britanniques disent «cul-de-sac» plutôt que «dead end»... mais les Français disent «impasse»! Photo: Sigmund, Unsplash
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Publié 12/06/2007 par Martin Francoeur

J’avais envie de revenir sur les mots français qui ont réussi à entrer dans la langue de Shakespeare. Et comme j’ai eu l’occasion récemment de faire un peu plus de deux mille kilomètres sur les routes et dans les villes anglaises, j’ai pu voir à quelques reprises des «culs-de-sac».

Oui, des «culs-de-sac». Nos amis britanniques ne disent pas «dead end» mais bien «cul-de-sac» pour désigner ces petits bouts de rues ou de routes qui n’aboutissent nulle part.

Sur les panneaux de signalisation, c’est «cul-de-sac» qui est inscrit. L’influence de la France d’outre-Manche y est sans doute pour quelque chose. Pourtant, les Français utilisent «impasse» depuis longtemps…

«Cul-de-sac» en Angleterre depuis le 18e siècle

Le Petit Robert nous dit que l’anglais a emprunté au français le mot «cul-de-sac» depuis le dix-huitième siècle, cinq cents ans après que l’expression elle-même soit entrée dans l’usage du français.

Le mot «cul-de-sac» est formé de «cul», employé ici dans une de ses définitions secondaires. Il faut attendre la cinquième définition du Robert pour apprendre que «cul» peut être, par analogie, le «fond de certains objets».

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On nous précise même que cet emploi est non vulgaire. Le cul d’une bouteille, d’un verre, d’un pot…

Donc le fond d’un sac… qu’on n’appelle pas cul!

Alors «cul-de-sac», c’est littéralement le fond du sac. Curieusement, on parle très rarement du fond d’un sac en employant «cul de sac». L’expression a été formée pour désigner spécifiquement une rue sans issue.

Plus tard, on a même prolongé le sens du mot «cul-de-sac» pour l’associer à une carrière ou à une entreprise qui ne mène à rien.

«Cul-de-sac» fait donc partie du petit groupe de mots français qui sont utilisés par les anglophones. Dans ce cas-ci, ce sont surtout les anglophones des îles britanniques.

Beaucoup de mots français au restaurant… évidemment

Il y a tout de même un bon nombre de mots de la langue de Molière qui ont traversé dans celle de Shakespeare.

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C’est dans les restaurants qu’on peut le plus facilement observer la pénétration des mots et expressions françaises en anglais. On nous offre des desserts «à la mode», c’est-à-dire servis avec crème glacée.

Étrange, parce que même au Canada francophone, on n’emploie pas cette expression. Ou à peu près pas. On nous propose régulièrement des plats ou des soupes «du jour», comme ici. Et ces plats peuvent parfois être offerts en «table d’hôte», une autre expression courante dans l’anglais des restos.

Les façons de préparer la nourriture ont elles aussi subi l’influence du français. À n’en pas douter, la cuisine ou la gastronomie française y est pour quelque chose. Ainsi, on peut demander en anglais un plat «au gratin», un morceau de viande «au jus» ou un plat «au naturel» et on sera parfaitement compris. Il en va de même pour les «hors d’œuvre».

Pour dessert, vous pourrez opter pour une «crème brûlée» ou pour une «tarte Tatin» sans problème…

La tendance s’inverse: de «cul-de-sac» à «dead end»

Évidemment, il n’y a pas que dans le vocabulaire de la gastronomie que le français a influencé l’anglais au point d’exporter certains mots ou expressions. La langue anglaise regorge de mots comme «coup d’état», «agent provocateur», «maître d’hôtel» ou «maître d’», «savoir-faire», «sang-froid», «rendez-vous» ou «papier mâché».

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On observe cependant que de moins en moins de mots français passent du côté anglais, alors que l’inverse est tout le contraire.

Le vocabulaire français est envahi, chaque jour ou presque, par des mots reliés aux nouvelles technologies ou, plus fréquemment, par des mots d’usage courant dans les emplois familiers. Les jeunes y sont pour beaucoup.

Ce ne sont pas tous les mots qui entrent officiellement dans la langue française. Mais ils sont présents dans l’usage, même familier. Et ça, ça témoigne de l’influence d’une langue.

Des jeunes francophones disent que quelque chose est «cool», que ça «chill». Ils parlent de la «street», d’une «wave», d’un «trend»… La liste est longue.

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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