Au-delà du style, la fonction

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Publié 14/10/2014 par Alix Forgeot

Quelle est l’influence du design sur la mode? C’est la question qui a été soulevée lors du débat Élégants… et aussi pratiques! animé par la rédactrice de mode Jeanne Baker, mardi dernier, au Musée Royal de l’Ontario (ROM), en parallèle à l’exposition La mode prend forme: assis avec style de la designer canadienne Izzy Camilleri, à l’affiche de la Galerie Patricia Harris des textiles et du costume, jusqu’au 25 janvier.

Aujourd’hui, la forme vestimentaire est souvent privilégiée, au détriment de la fonction et parfois du confort. Ce n’est pas étonnant lorsque l’on sait que la mode est imaginée en fonction du croquis d’un corps «debout».

Or, au quotidien, cette posture peut changer et finalement, tout le monde ne peut pas se tenir de cette façon; c’est le cas des personnes à mobilité réduite.

Dépasser les frontières de la mode

Pour palier la situation, Izzy Camilleri, a réinterprété la mode, revu ses codes et créé, en 2009, IZ Adaptive, une collection à destination des personnes en fauteuil roulant, dont certains modèles sont exposés au ROM.

Un trench, une veste en cuir, une chemise pour homme, un pantalon, ou une robe de mariée, plusieurs pièces classiques ont été réinterprétées par la designer canadienne pour les hommes et les femmes qui ont de la difficulté à s’habiller.

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La designer s’est débarrassée des épaisseurs inutiles et inconfortables, a reconsidéré la gravité et s’est mise à travailler sur une silhouette en forme de «L» de façon à ce qu’en position assise, les vêtements restent classiques et deviennent originaux lorsque le sujet se lève. C’est le cas d’une «maxi-jupe» inspirée des années 1930; portée assise, elle apparaît classique et une fois debout, elle arbore un côté asymétrique original.

L’esthétique rencontre ainsi le pratique: les chemises pour femmes sont dotées d’aimants.

Quant aux pantalons, ils voient leurs mesures de devant réduites puis ajoutées à l’arrière. Ainsi, lorsque le sujet s’assied, la taille du pantalon est droite et ne tombe pas sur le derrière. Les élastiques sont aussi privilégiés pour éviter toute pression exercée par le vêtement sur le ventre.

Un défi quotidien

Pour la rédactrice de mode Jeanne Baker, ce sujet est «vital». Izzy Camilleri appuie ses propos: «Mes clients me rappellent sans cesse à quel point la mode peut contribuer au bien-être».
En effet, trouver des vêtements faciles à enfiler et confortables apparaît comme un défi quotidien pour les personnes à mobilité réduite.

Luke Anderson, ingénieur torontois, se déplace en fauteuil roulant. Il est devenu adepte des pantalons de la collection IZ Adaptive: «ces pantalons sont magiques, contrairement aux pantalons normaux qui, lorsque je m’assieds, tombent à la moitié de mon derrière», explique-t-il. Une situation gênante à laquelle il a été confronté dans un avion alors qu’un membre de l’équipage l’aidait à s’asseoir.

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Autre exemple: «Quand il pleut, quelqu’un qui est en chaise roulante a vite les cuisses trempées», note Mme Camilleri. Le problème, c’est que «l’industrie de la mode ne prend pas en compte ce qui se passe avec le corps».

Pour Barbara Turnbull, quadraplégique depuis l’âge de 17 ans, la collection d’Izzy Camilleri est une vraie révolution: les personnes à mobilité réduite «peuvent commander un manteau, c’est juste extraordinaire!»

Sa pièce préférée, c’est sans nul doute sa cape d’hiver en «rason» (peau de mouton), une des premières pièces de la collection IZ Adaptive. «J’avais de la difficulté à trouver un vêtement beau, chaud et adapté à un fauteuil roulant», explique Madame Turnbull. Elle a donc fait appel à Izzy Camilleri.

«Au début je pensais que ça serait court et finalement elle m’arrivait au niveau des genoux! J’ai aussi commandé un chapeau pour aller avec. D’un coup, je portais quelque chose de passe-partout que je pouvais mettre plusieurs fois dans l’année! Cela ne m’était encore jamais arrivé…»

Le fait de mêler design et mode, le côté pratique et l’esthétique a définitivement un impact positif sur le quotidien des gens. Luke Anderson, l’ingénieur torontois, en a bénéficié, puisque cela lui a permis de «gagner confiance» en lui.

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