Père Boulad: le don qui change le monde

Difficile de décrire cette énergie vitale émanant du Père Henri Boulad sj… une énergie lumineuse, miraculeuse, qui le propulse toujours plus haut, toujours plus loin, traversant mers et monde et s’arrêtant d’un pays à l’autre, avec pour seul bagage un immense message d’amour. Comme un certain Jonathan le goéland…

Homme de cœur et d’action fuyant la facilité, la superficialité et l’inconstance, et se refusant à ne mettre aucune limite à ses rêves et à ses désirs, Père Boulad martèle obstinément son espoir en l’homme, l’invitant à le suivre sur le chemin de l’action et de l’effort, du devoir et du sacrifice, de l’engagement et du dépassement de soi, car pour lui, la solidarité, l’amour fraternel, le don de soi, la charité, sont les valeurs fondatrices de l’humanité.

«Changer le monde» est sa devise, l’idéal de sa vie… Et à 85 ans, 5 mois après un ACV dont il s’est vite remis, tel un miraculé, il y croit encore et plus que jamais.

Rencontré par L’Express à Montréal, le 27 août dernier, lors d’une soirée-bénéfice pour les enfants pauvres d’Égypte réunissant la grande communauté égyptienne et alexandrine de Montréal, Père Henri Boulad, plus en forme que jamais, a chanté, dansé et allumé les cœurs comme il sait si bien le faire.

Ce fut également l’occasion de souligner en grand ses 85 ans qu’il fêtait le lendemain. Il est né le 28 août 1931.

Il confie avec sourire: «Le Seigneur m’a fixé comme seuil final 120 ans… donc si vous êtes forts en mathématiques, cela me fait encore 35 ans devant moi. Tranquillisez-vous… j’ai de quoi les remplir. Mon objectif est toujours le même: changer le monde, et je voudrais faire de cet objectif l’idéal de vie de tous ceux et celles qui sont ici et qui liront cette interview… Un idéal qui vous aspirera en avant, qui vous donnera des ailes, qui insufflera sans cesse en vous une nouvelle jeunesse.»

Changer l’Égypte

Depuis plus de 50 ans, avec ses nombreux projets humanitaires, Père Boulad consacre sa vie aux plus démunis d’Égypte, un pays qui traverse une période difficile et qui connaît une inflation exponentielle, tandis que les salaires ne bougent pas.

«Entre 2015 et 2016», précise-t-il, «le prix pour un kilo de poulet est monté de 12 à 22 livres égyptiennes, le poisson de 12 à 24; même chose pour les denrées de base: un kilo de riz de 3 à 8, la farine de 3 à 5, le macaroni de 1,5 à 3,5; l’huile de 8,5 à 12, sans oublier les fruits et les légumes, un kilo de raisin de 4 à 8, les haricots de 5 à 15, les concombres de 2 à 6. Quant aux prix de l’eau, du gaz et de l’électricité, les prix ont été multipliés par trois. Cette inflation est dramatique, les gens n’y arrivent plus et les salaires sont misérables tournant autour de 100 dollars canadiens par mois, pour toute une famille.»

Avec les dons recueillis en terre canadienne l’an dernier (Montréal et Toronto), le Père Boulad a soutenu des dizaines de cas sociaux en fournissant médicaments, opérations, scolarités, logements.

Il a aussi financé 20 colonies de vacances pour 1295 enfants défavorisés – handicapés, enfants de la rue, soudanais, jeunes des villages – dans la nouvelle maison Abou-Talaat, située au bord de la mer à 20 km à l’ouest d’Alexandrie. Ce centre de loisirs et de formation qu’il a aménagé avec soin, offre des moments de bonheur et de partage aux enfants chrétiens et musulmans.

Un toit pour toi

Autre projet lui tient à cœur: Un toit pour toi, suivi par les Jésuites de Minia (sud du Caire) et financé en partie par l’association Coup de Cœur Boulad (Suisse) et de nombreux bienfaiteurs.

Des milliers de familles vivent dans des maisons de boue à moitié effondrées suite aux pluies torrentielles qui se sont abattues sur la région en 2006, dans les villages de Kedwan, El-‘Awwam, Al-Tell et au Sud de Minia. Père Boulad les aide à reconstruite leur taudis en ruine.

«Nous fournissons aux paysans blocs de pierre calcaire, sable et ciment, et toute la famille se met au travail… Nous avons déjà construit plus de 100 maisons… il en reste 11 à bâtir. Avec 3,200 $ on peut reloger une famille… Il restera les portes les fenêtres, l’eau, le sanitaire, l’électricité – ce qui représente un nouveau budget. Mais commençons par le plus urgent: les murs et le toit. Le reste suivra.»

L’Égypte compte aujourd’hui près de 90 millions d’habitants et presque la moitié de cette population vit au-dessous du seuil de pauvreté, à raison de 2$ CAD par jour.

Pour aider les Égyptiens à sortir de la misère, le comité organisateur des soirées-bénéfice du Père Boulad à Montréal – tous des bénévoles – a mis sur pied en 2015 Les Amis du Père Boulad. C’est un site sur lequel il est possible de faire des dons et d’en apprendre davantage sur les nombreux projets et les actions mis en œuvre par ce jésuite au cœur d’or.

Prochaine escale: Toronto

Plusieurs se souviennent du passage d’Henri Boulad dans la ville reine en juillet 2015, alors qu’il était venu participer sous l’égide de Caritas-Égypte, à un premier dîner-bénéfice destiné à recueillir des fonds pour aider les enfants égyptiens défavorisés.

Il avait d’ailleurs profité de ce séjour pour offrir une série de conférences sur la montée de l’athéisme en Égypte au centre culturel Beit Zatoun ainsi qu’à l’Alliance française de Toronto.

L’homme sera de retour à Toronto dans quelques jours – ce samedi 10 septembre – pour participer à un deuxième dîner-bénéfice dont la mission a été élargie pour y inclure des projets de collecte de fonds, liés aux conflits en Syrie et en Irak.

Cette grande soirée, à laquelle se joignent les évêques des communautés syriaques, chaldéennes et slovaques-catholiques byzantine autour de Thomas Collins, archevêque catholique de Toronto, se fait en partenariat avec l’Association catholique d’aide à l’Orient (CNEWA) et en présence de son directeur national, Carl Hétu.

Ayant pour thème Baptême par le feu, une réflexion sur le christianisme au Moyen-Orient et dans notre monde contemporain, les hôtes pourront entendre de vibrants témoignages sur la situation des minorités chrétiennes persécutées au Moyen-Orient.

Ne manquez pas ce rendez-vous unique avec les convives de cet infatigable voyageur, qui, d’un pays à l’autre, s’arrête un moment pour nous inviter à le suivre, à poser des gestes de charité envers nos semblables afin de gagner le ciel et d’atteindre le Très-Haut. Comme un certain Jonathan, le goéland…