L’impact de la régionalisation de l’immigration sur l’éducation (2)

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Publié 09/12/2008 par Annik Chalifour

Ce reportage constitue la 2e partie d’une série d’articles portant sur les enjeux liés à la régionalisation de l’immigration dans le cadre du 5e Séminaire canadien de recherche sur l’immigration en dehors des grands centres tenu à l’Université de Sherbrooke les 27, 28 et 29 novembre. Voici un survol des innovations et défis relatifs à l’éducation dans un contexte de diversité. (La semaine prochaine: la santé)

Dans le secteur de l’éducation, certaines questions reviennent. Par exemple, le rôle des parents nouveaux arrivants dans la réussite scolaire de leurs enfants.

Depuis 2001, la réussite scolaire au Québec mise sur la relation école-famille. Annick Lenoir, professeure adjointe au Département du service social à l’Université de Sherbrooke présente un résumé de sa recherche portant sur l’étude d’autres cultures, notamment des Arméniens et Maghrébins, quant à la perception du rôle des parents dans la réussite scolaire de leurs enfants.

«L’étude révèle que les familles d’immigrants plutôt défavorisées ne s’impliquent pas avec l’école. Les parents perçoivent l’école comme une menace. En particulier l’école publique représentant un danger contre les valeurs culturelles», dit Mme Lenoir.

En Ontario, l’engagement parental est l’un des axes principaux d’intervention de la politique d’aménagement linguistique du ministère de l’Éducation. Pourtant, l’implication des parents nouveaux arrivants avec l’école reste au coeur des défis de plusieurs écoles françaises ontariennes.

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L’impact de l’immigration grandissante sur le système d’éducation est indéniable. Les directeurs d’établissements scolaires doivent faire face à la gestion d’écoles devenant de plus en plus pluriethniques. Tandis que les enseignants font face à des élèves avec des profils culturels différents, des histoires différentes et des habiletés en communication différentes. Doivent-ils en tenir compte dans leur façon d’enseigner?

D’autre part, comment attirer les parents immigrants à se joindre au conseil des parents de l’école et à prendre part aux activités de la vie scolaire? Un manque de sensibilité culturelle chez les intervenants scolaires peut être un facteur d’influence sur la qualité de leur communication avec les parents nouveaux arrivants et vice-versa.

Le secteur de l’éducation, comme celui de l’employabilité, doit être sensibilisé à la diversité. Ceci suppose la révision des programmes d’éducation à la citoyenneté et à l’identité canadienne, et la formation des intervenants scolaires.

N’est-il pas temps de révisiter le concept traditionnel de la mosaïque canadienne? Par la mise en place d’un programme d’études axés sur l’acquisition des compétences (inter)culturelles pour vivre et travailler efficacement dans notre société que certains disent multiculturelle, d’autres pluraliste (on tranche avec le mot diversité), et pour redynamiser nos relations internationales.

Les compétences (inter)culturelles, soit les compétences à l’identité, la communication, l’adaptation, la médiation, vont de pair avec l’implantation d’une stratégie à long terme de solidarité sociale et de développement (économique) durable.

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L’éducation intercultuelle

En 2007, Marilyn Steinback professeur à l’Université de Sherbrooke, a réalisé une recherche portant sur l’intégration socio-scolaire des élèves Néo-Canadiens au palier secondaire en région.

Les conclusions de sa recherche démontrent que les conflits entre les élèves immigrants et Québécois sont liés à une incompréhension mutuelle de leurs valeurs culturelles respectives, ainsi qu’à des problèmes aïgus de communication interculturelle.

Mme Steinback promeut «la mise en oeuvre d’un programme d’éducation interculturelle ciblant les élèves Canadiens et Néo-Canadiens. Elle mentionne «une approche bidirectionnelle en matière de formation à la diversité» – ceci rejoint le même concept dont nous avons parlé dans l’article de la semaine dernière, soit la formation à la diversité nécessaire à la fois pour les employeurs Canadiens et les employés nouveaux arrivants.

Les programmes d’études pour les enseignants devraient inclure les éléments d’une pédagogie inclusive adaptée au contexte de classes pluriethniques.

Diane Farmer, de l’Université de Toronto, partage quelques réflexions sur l’accueil des élèves immigrants au sein des établissements d’éducation à partir de recherches menées dans les écoles françaises de l’Ontario.

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«L’immigration en contexte scolaire francophone en Ontario constitue un milieu dynamique. Les pratiques évoluent plus rapidement que les politiques», dit-elle. «Il faut regarder les jeunes tels qu’ils sont, leur bagage culturel. Tenir compte du regard critique des jeunes.» Mme Farmer réfère également au réseautage informel créé entre les jeunes (une recherche menée par Mary Richards).

Nouveau programme de Maîtrise en médiation interculturelle

L’Université de Sherbrooke vient de lancer un nouveau programme de Maîtrise en médiation interculturelle depuis septembre 2008. Il s’agit d’une première au Canada. 15 étudiants issus de divers milieux d’affaires et profils culturels forment la première cohorte de ce programme d’avant garde.

Une étudiante d’origine tunisienne inscrite au programme, conçoit que «la médiation interculturelle fait et fera partie des atouts incoutournables pour l’évolution positive de la société multiculturelle canadienne.» Elle a vécu et voyagé dans plusieurs pays avec ses parents diplomates.

«Le programme est chapeauté par les Facultés d’administration, de droit, d’éducation, des lettres et sciences humaines et de théologie, d’éthique et de philosophie. Il vise à former des intervenants de haut niveau dans le domaine interculturel», annonce Sébastien Lebel-Grenier, vice-doyen à la faculté de Droit de l’Université de Sherbrooke.

Ce nouveau programme d’études de 2e cycle interdisciplinaire inédit dérive des recommandations du rapport de la Commission Bouchard Taylor. À travers ce programme, l’Université de Sherbrooke refaçonne sa vision en tant qu’institution académique orientée vers les besoins du pluralisme et de l’internationalisation.

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Mme Michèle Vatz-Laaroussi est directrice de programme de la Maîtrise en médiation interculturelle. Elle est également chargée de coordonner les activités du Réseau canadien de recherche sur l’immigration en dehors des grands centres.

«Le Réseau a été créé en 2003 et poursuit ses activités grâce au soutien des Centres Métropolis du Québec et Métropolis Atlantique. Le prochain séminaire du Réseau se tiendra en mai 2009 et sera axé sur l’international. Des représentants de la Suisse, Belgique, l’Allemagne et l’Australie viendront présenter leurs recherches sur l’immigration en région à l’Université de Sherbrooke», informe Mme Vatz-Laaroussi.

Auteur

  • Annik Chalifour

    Chroniqueuse et journaliste à l-express.ca depuis 2008. Plusieurs reportages réalisés en Haïti sur le tourisme solidaire en appui à l’économie locale durable. Plus de 20 ans d'œuvre humanitaire. Formation de juriste.

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