Coco avant Chanel: le destin extraordinaire d’une petite fille ordinaire

Vêtue d’une robe noire, une petite fille attend sagement la venue de son père, en vain. Placée en orphelinat, avec sa sœur, Gabrielle Chanel n’est pas encore celle dont on se rappelle par le prénom Coco. Le film Coco avant Chanel retrace l’ascension sociale d’une femme de principes, refusant les conventions de la Belle Époque.

Toute belle réussite se mérite et doit donc commencer par des périodes difficiles pour le héros. Coco avant Chanel est un film très classique de ce côté là. Le soir, la jeune fille, orpheline, chante avec sa sœur, dans des «beuglants», sorte de cabarets pour soldats éméchés. Le jour, elle travaille comme apprentie couturière dans l’arrière-boutique d’un petit tailleur de province. Rien de très folichon.

C’est parfait, sa vie ne pourrait être plus banale. Chanel commence enfin à coller aux pré-requis d’une future icône. La jeune fille est dotée d’une ambition et d’intelligence remarquables. Son leitmotiv: s’en sortir à tout prix.

Elle fait la connaissance d’Étienne Balsan (Benoît Poelvoorde) un riche bourgeois qui tentera de lui faire décrocher une place dans un cabaret plus prestigieux. Sans succès. Aucune issue ne semble se profiler pour l’héroïne.

Après qu’Étienne ait terminé son service militaire, il s’en retourne chez lui, près de Paris, en laissant derrière lui une Coco (le surnom depuis l’enfance, de Gabrielle) qui perd tout espoir d’une carrière de chanteuse.

Carcan social

Dans une société rongée par le carcan rural noblesse-bourgeoisie-clergé, qui bloque toute mobilité sociale, la jeune femme tente l’impossible et décide de partir rejoindre son protecteur, Étienne Balsan, dans son «château».

Elle y trouve un monde marqué par le superflu, le libertinage et la fête, et régi par des codes de conduite stricts et les étiquettes. Elle découvre l’univers des courtisans. Elle fait connaissance d’une actrice, Émilienne (Emmanuelle Devos) et tombe en amour avec le britannique Boy Capel (Alessandro Nivola).

La mode est alors aux froufrous, aux grands drapés et aux vêtements très élaborés. À l’opposé, Gabrielle se distingue par son attachement à la simplicité des coupes et à la couleur noire, qui seront plus tard sa marque de fabrique.

La suite, un départ à Paris, puis une réussite, la réussite, celle qui fait qu’on tourne un film sur votre vie près d’un siècle plus tard.

Audrey Tautou

Audrey Tautou incarne à merveille la femme derrière le personnage, avec ses peurs, ses doutes, ses hésitations, et sa détermination. À la fin du film, la réalisatrice Anne Fontaine a, brutalement et superbement, métamorphosé Gabrielle en Coco Chanel, celle que l’on connaît, vêtue d’un de ces tailleurs qui faisaient rêver nos mères.

Les costumes représentent presque l’intérêt principal du film puisque Anne Fontaine rate le coche et nous fait passer à côté de ce qui nous intéresse tous, l’explosion de Coco Chanel à Paris. Lorsque la scène finale nous montre le mythe, on ne peut que regretter cette ellipse narrative sur la période charnière de la vie de cette icône de la féminité, jamais mariée et qui incarne pour beaucoup rien de moins que la naissance de la femme moderne.

Le mythe Coco Chanel perdure et cette femme hors du commun donne un dernier conseil à ceux qui rêvent d’un tel destin : «J’ai créé la mode pendant un quart de siècle. Pourquoi? Parce que j’ai su exprimer mon temps»

Coco avant Chanel, avec Audrey Tautou, Benoît Poelvoorde, Alessandro Nivola, Marie Gillain, Emmanuelle Devos, Roch Leibovici. À l’affiche en salles commerciales à Toronto.