Commissaire cherche interlocuteur

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Publié 15/07/2014 par François Bergeron

Le commissaire aux services en français de l’Ontario, François Boileau, recommande au président de l’Assemblée législative de mettre en place un Comité permanent sur les services en français afin de traiter des questions liées au bien-être et à l’épanouissement de la communauté francophone de l’Ontario.

Il s’agit là de la première recommandation du rapport annuel 2013-2014 du commissaire, intitulé Une institution francophone s’enracine (la sienne), publié jeudi dernier.

En janvier, le Commissariat a quitté le giron gouvernemental pour faire partie intégrante de l’Assemblée législative de l’Ontario à titre d’organisme indépendant (comme la Vérificatrice ou de l’Ombudsman). Mais François Boileau fait remarquer qu’il n’a pas de véritable interlocuteur au sein du Parlement pour assurer le suivi aux recommandations formulées dans ses rapports.

«Je veux dialoguer avec mes 107 nouveaux patrons – les députés –, mais je me suis aperçu qu’il n’y a nulle part au Parlement où obtenir une réaction aux recommandations et propos rendus dans mes rapports. Il est donc souhaitable que les élus se dotent d’une véritable tribune pour examiner les questions et enjeux liés à l’application de la Loi sur les services en français», a déclaré le commissaire.

La ministre déléguée aux Affaires francophones, Madeleine Meilleur, reste cependant une «interlocutrice» de François Boileau, tout comme les critiques de l’opposition aux Affaires francophones, France Gélinas pour le NPD et Gila Matlow pour les conservateurs.

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Mme Meilleur a d’ailleurs déclaré la semaine dernière que le commissaire «continue d’aider le gouvernement à améliorer la qualité de la prestation des services en français».

Stabilité

En conférence de presse, François Boileau s’est permis de se réjouir de la récente élection d’un gouvernement majoritaire à Queen’s Park. «Qui dit majorité dit stabilité», a-t-il souligné. «Ceci offrira pour les prochaines années une belle continuité et permettra de poursuivre les avancées entamées des dossiers prioritaires du Commissariat.»

Dans une autre recommandation, le commissaire demande au gouvernement d’entamer un dialogue avec le public quant à ses actions à l’appui de l’application de la Loi sur les services en français «par l’entremise du dépôt d’un rapport annuel détaillé, engagé et pertinent sur les affaires de l’Office des affaires francophones».

«L’indépendance du commissaire lui permet d’être encore plus pertinent dans ses recommandations», a réagi le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Denis Vaillancourt.

Selon lui, «il est effectivement essentiel d’avoir un comité permanent à Queen’s Park pour veiller à faire un suivi des recommandations qui sont formulées dans les rapports annuels du commissaire. De plus, nous sommes absolument convaincus de la nécessité d’avoir, chaque année, un rapport de l’Office des affaires francophones.»

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Le septième rapport annuel du commissaire propose aussi que le ministre des Affaires civiques et de l’Immigration se dote, durant l’exercice financier 2014-2015, d’un groupe d’experts en matière d’immigration francophone afin d’élaborer un plan pour atteindre la cible de 5% d’immigration francophone.

Et il incite la Procureure générale (toujours Madeleine Meilleur) à mettre en œuvre un projet pilote d’amélioration de l’accès à la justice en français.

Il manifeste une certaine impatience dans certains dossiers, qualifiant par exemple de «décevante et incompréhensible» la réponse du gouvernement à la première recommandation de son dernier rapport annuel sur l’accès aux services en français des populations les plus fragiles de la société.

Offre active

Le commissaire se dit par ailleurs «stupéfait» de la réponse du gouvernement concernant sa recommandation d’une directive claire en matière d’offre active des services en français.

Un nouveau règlement n’a rien réglé selon lui, et l’idée de sensibiliser davantage les employés de la fonction publique «ne représente qu’un remède homéopathique à une problématique systémique». Tout dépend encore de la bonne volonté de chaque institution gouvernementale, rien n’est obligatoire.

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L’offre active de services en français est encore plus problématique chez les tierces parties (communautaires ou privées) contractées par le gouvernement pour offrir des services publics.

Dans le domaine de la santé, notamment, «une sérieuse menace plane». Le gouvernement aurait en effet déterminé que les fournisseurs de services de santé ne sont pas assujettis au règlement sur les tiers en raison de leur relation particulière avec les réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS). Les fournisseurs de services de santé ne travailleraient pas directement pour le compte du gouvernement et seraient ainsi exemptés de fournir des services en français.

«C’est donc dire», s’insurge le commissaire, «que si les RLISS n’existaient pas, certains fournisseurs de services dans le domaine de la santé seraient assujettis à la Loi»!

«Il s’agit de haute voltige juridique que les Franco-Ontariens ne connaissent que trop bien. Avec un tel argumentaire, on s’éloigne considérablement de l’esprit de la loi», dénonce François Boileau.

Celui-ci rapporte par ailleurs qu’il planche sur:

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• l’amélioration du régime d’acquisition des écoles, très critiqué par nos conseils scolaires de langue française, notamment à Toronto et dans le centre-sud de la province, dont les écoles débordent alors que plusieurs bâtiments appartenant à des conseils scolaires anglophones sont à moitié vides;
• les services en français des sociétés d’aide à l’enfance et de soins à domicile aux aînés;
• la place du français aux Jeux PanAm de Toronto en 2015;
• la désignation de nouvelles régions sous la Loi des services en français et les services en français à Ottawa.
Bons coups
Le commissaire souligne aussi plusieurs «bons coups»:
• la présence de l’Ontario au sein d’un comité de Citoyenneté et Immigration Canada sur les communautés francophones en milieu minoritaire;
• une consultation sur les entreprises sociales francophones;
• un forum de représentants des Réseaux locaux d’intégration des services de la santé (RLISS), des Entités de planification des services de santé en français et du ministère de la Santé et des Soins de longue durée;
• une étude sur les besoins juridiques des femmes francophones de l’Ontario
Il distribue ainsi une trentaine de «pratiques exemplaires», «initiatives encourageantes» et «mentions honorables»…

Le Commissariat a reçu 280 plaintes au cours des douze derniers mois, 55% d’entre elles pour des manquements aux services en français dans l’Est de l’Ontario et 32,5% à Toronto et dans le Centre de la province. 190 plaintes ont été jugées «recevables», une pluralité d’entre elles (43) contre le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, qui est, il est vrai, le plus gros ministère du gouvernement.

Le rapport 2013-2014 du Commissaire aux services en français de l’Ontario

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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